Combien d’injustices, chaque jour, causées par des conclusions hâtives, elles-mêmes fondées sur de bêtes préjugés, eux-mêmes socle de la paix sociale ?
Tenez, depuis quelques mois, on avait parfois la désagréable surprise de trouver une flaque d’urine dans l’ascenseur. Pour les locataires de l’immeuble, l’affaire était entendue, le responsable était le caniche récemment acquis par madame Bite (certains patronymes ne sont pas faciles à porter, c’est vrai, encore une injustice) alors que, techniquement, cette immondice pouvait très bien être le fait des dobermans de monsieur Con (lui porte très bien son nom, le destin peut être implacable ET pertinent). Bref, aucune preuve mais notre instinct social était formel : mieux vaut accuser un caniche que deux dobermans. L’odeur pestilentielle nous faisant perdre tout jugement, combien de regards outrés la pauvre madame Bite n’a-t-elle pas essuyés ? Et n’aurait-on pas fini par la condamner à essuyer plus que des regards si la situation avait perduré ?
Or, force est de constater qu’on n’a plus vu une seule trace d’urine dans l’ascenseur depuis le décès du retraité du sixième étage.